Barras Émile ALIAS : Thiollon Résistant et juste 1921 Avry-devant-Pont (suisse) 1996 Médaille des justes parmi les nations / R.F.I : Armée secrète / Francs-Tireurs et Partisans / Forces Française de l’Intérieur / BiographieNé en 1921 à Avry-devant-Pont, dans le canton de Fribourg en Suisse, Émile Barras jouit de la double nationalité, suisse et français. Résistant, il est employé comme ouvrier agricole chez M. Chavez qui tenait le Café de la Poste à Viry près de la frontière genevoise, et aide des alliés parachutés en France à passer en Suisse ou en Espagne. Il est contacté par Joseph Fournier qui va se servir de son camion pour faire passer clandestinement en Suisse des enfants juifs à la demande des EIF (Éclaireurs israélites de France) et du Mouvement de la jeunesse sioniste. Comme Émile Barras connaît bien les routes de la région, Joseph Fournier lui demande de l'aide pour faire passer un groupe d'enfants. Il accueille un premier groupe conduit par une jeune juive, Marianne Cohn, arrivant d'Annemasse le 22 mai 1944. Émile Barras, qui les attend à la gare, remarque la présence de soldats allemands venus contrôler les voyageurs. Heureusement, le train arrive en retard et les Allemands, las d'attendre, étaient déjà partis. Émile Barras fait passer le groupe en Suisse. D'autres groupes suivront En mai 1944, Marianne Cohn est arrêtée à la sortie de Viry près d'Annemasse alors qu'elle tentait de passer la frontière avec 28 enfants juifs âgés de 4 à 16 ans. Émile Barras, les attendait sur la route lorsqu'il vit arriver une voiture allemande occupée par quatre militaires allemands. Marianne Cohn et Joseph Fournier prétendirent être en route vers un orphelinat de la région, tandis que Raoul Fournier, le frère de Joseph Fournier recruté pour l'opération, déclara aller à la pharmacie et réussit à s'enfuir. Marianne Cohn est emprisonnés avec les enfants à l’Hôtel Pax transformé en prison par la Gestapo. Le 8 juillet 1944, le maire d'Annemasse, Jean Deffaugt qui avait réussi à faire libérer tous les enfants, remarque, lors de l'une de ses visites à la prison du Pax, qu'il manque six détenus. Les autorités allemandes lui font savoir qu'ils ont été transférés à Annecy. Le 23 août 1944, soit quelques jours après la libération d'Annemasse, les autorités civiles et militaires découvrent six cadavres à Ville-la-Grand, assassinée le 8 juillet 1944 dont celui de Marianne Cohn qui allait avoir 22 ans. Le 3 mars 1996, l'Institut Yad Vaschem a décerné à Émile Barras le titre Juste parmi les nations. Témoignage Témoignage d’Émile Barras, passeur dans la région de Viry-Soral Déposition de M. Émile Barras le 18 octobre 1994, interviewé à son domicile de 01410 Chézery-Forens (Ain) par M. Herz, délégué Yad Vaschem (entretien enregistré sur cassette). Émile Barras : Je ne suis pas natif de Viry, mais j’y étais pendant la guerre, employé chez M. Chavaz, qui tenait le Café de la Poste, maintenant Les Vieux Tilleuls. Je suis binational, né en Suisse. 1942 : À l’époque, beaucoup de Juifs arrivaient dans ce café par car. Ils restaient un jour ou deux, s’inquiétant de la possibilité de passer en Suisse. On les voyait disparaître sans revenir : c’est qu’ils avaient réussi à passer. À l’occupation de la zone sud par les Allemands, il y a eu un afflux de Juifs au café. Je n’ai pas participé au passage de la frontière de ces Juifs-là. J’avais donné ma parole à M. Blanc, un ancien du 27e BCA, de passer éventuellement des aviateurs ou des personnes clandestines en France, et je ne voulais pas m’occuper des deux. Lieu de passage : près de la douane de Rougemont (commune de Soral, CH). À l’heure de la relève des douaniers, entre minuit moins trois et minuit plus trois minutes, on avait 90 % de chances de passer sans être pris. Sinon, bien souvent, si des Juifs passaient par là, ils étaient refoulés immédiatement. Une fois, sur ordre de mon chef, j’ai fait passer deux jeunes, un frère et une sœur. Mon chef m’avait dit en plaisantant : « Tu te paieras sur la fille. » Elle avait environ 16 ans, son frère était plus jeune. Ils n’ont pas été refoulés. Question de M. Herz : Certaines personnes que vous avez aidées se sont-elles manifestées après la guerre ? Êtes-vous resté en contact avec elles ? Hélas, non. Un seul témoignage, celui d’un capitaine anglais qui avait été blessé en 1914-1918. Il avait payé vingt-cinq mille francs à l’époque (1942-44) à un autre passeur pour se faire conduire en Suisse, mais il avait été abandonné dans les « bois blancs » (commune de Feigères, près de Saint-Julien-en-genevois). Arrivé avec un camarade dans un café de Viry, ils ont demandé si quelqu’un pouvait les conduire à la frontière. On est venu me chercher, mais je m’étais blessé au genou huit jours auparavant, en jouant au football. Je leur ai dit : « Je veux bien vous aider, mais il faudra du temps, je ne peux pas marcher vite. » Le foin était haut, c’était au mois de juin. Ils ont été patients, et nous avons bien traversé la frontière. Trois semaines plus tard, je suis allé en Suisse sur ordre de mon chef pour ramener des gars. Ces hommes allaient en Suisse pour obtenir de faux papiers, puis cherchaient à rejoindre l’Afrique du Nord ou l’Angleterre via la France et l’Espagne. Cette nuit-là, j’ai repris cet homme en Suisse avec un autre, les ai ramenés et les ai fait coucher dans le foin chez mon patron à Viry. Le lendemain matin, il m’a reconnu. Et j’ai ici un papier ; je pense que c’est lui qui me l’a envoyé après la guerre. Concernant les enfants juifs : un ami de Viry m’a contacté en mai 1944 pour me demander si j’accepterais de faire passer en Suisse des enfants juifs. Cet ami, c’était Joseph Fournier, le chauffeur de camion (dont nous avons déjà parlé lors d’un entretien précédent). Ces enfants devaient arriver par train, un mardi ou un mercredi. Il était convenu que je les prendrais à la gare de Viry pour les emmener à la frontière suisse. Je me suis présenté à la gare, le train devait arriver, je crois, à midi moins cinq. Mais quand je suis arrivé, il y avait des Allemands. Le train n’est pas arrivé. À midi pile, les Allemands sont repartis au Château de Viry (où ils stationnaient). C’était, je pense, la fin de leur service. La date : aux environs du 20 mai. (Plus tard) Le train est finalement arrivé. Trente-quatre enfants juifs en sont descendus, accompagnés de Marianne Cohn et d’une jeune assistante sociale. À l’époque, je ne connaissais pas Marianne Cohn. Peut-être l’avais-je rencontrée une semaine auparavant, mais je ne m’en souviens pas. La gare est en contrebas de Viry. Le chemin le plus court pour aller en Suisse aurait été de suivre la voie ferrée en direction de Saint-Julien, mais la voie passe par le pont sur la Laire, où nous aurions été à découvert, à la vue directe du château Via Marie où étaient les Allemands. J’ai donc fait monter les enfants au village de Viry. Nous avons pris l’ancienne route de Saint-Julien, puis traversé les champs jusqu’à la frontière suisse. Mais l’assistante sociale ne nous a pas suivis jusqu’au bout ; elle a continué vers Saint-Julien quand nous avons quitté la route. Elle et Marianne Cohn devaient se retrouver à Saint-Julien pour reprendre la direction d’Annecy. Lieu de passage de la frontière : près de la douane de Rougemont, appelée aussi Soral 1 ou Soral 2. Il y avait des barbelés tout le long de la frontière, du côté suisse, très tendus avec des pieux tous les deux mètres. Le fil de fer barbelé le plus bas frôlait le sol. J’ai posé mon veston dessus, soulevé le fil juste au-dessus, et Marianne Cohn a fait passer les enfants entre les deux fils, un par un. Pendant ce temps, du côté suisse, un douanier surveillait si les Allemands arrivaient d’un côté ou de l’autre. Quand tout le monde était passé, Marianne Cohn a donné ses instructions au douanier et lui a demandé de téléphoner à tel numéro à Genève. Ensuite, nous sommes repartis. (Je me suis demandé comment il se faisait qu’il y ait une organisation du côté suisse, en contact avec Marianne Cohn, mais que personne ne se soit jamais intéressé au sort des enfants du deuxième convoi, celui qui a été arrêté.) Je suis retourné avec Marianne Cohn de la frontière jusqu’à la route de Saint-Julien. Là, nous nous sommes séparés. Il était environ 14 h, c’était un mardi ou un mercredi. Marianne Cohn et moi avions à peu près le même âge. Il était entendu, lorsque nous nous sommes quittés, qu’un autre convoi aurait lieu la semaine suivante. Mais comme les Allemands étaient en gare de Viry, je me suis dit que ce convoi était compromis. (Quand j’ai vu, une semaine plus tard, que le camion transportant le deuxième groupe était suivi par les Allemands, je me suis longtemps demandé s’ils étaient suivis depuis longtemps ou non.) Après avoir signalé le passage réussi du premier groupe à Joseph Fournier, celui-ci, qui était en contact avec Marianne Cohn ou ses supérieurs, a décidé que Joseph Fournier irait chercher les enfants à Annecy avec son camion. Quand Joseph Fournier est arrivé à Viry avec les enfants dans le camion, je n’avais pas encore fini mon travail chez mon patron. J’étais en train de soigner les bêtes. C’est mon frère Raoul Fournier qui était sur place pour attendre le camion. Ensuite, Raoul Fournier est venu me prévenir que les enfants étaient arrivés. J’ai dit de mettre le camion à l’embranchement du chemin des … sur la route de Saint-Julien, en attendant que j’arrive. De chaque côté du chemin, il y avait une grosse haie. Je me suis dit que le camion pourrait reculer là-dedans et que nous serions tranquilles pour faire descendre les enfants. Le temps de finir de traire une vache et de porter le lait à la fromagerie, cela m’a pris un quart d’heure, vingt minutes au maximum. Puis j’ai pris mon vélo et suis allé sur la route de Saint-Julien. Quand je suis arrivé au carrefour de l’ancienne route, j’ai vu des casques allemands. J’ai fait encore trente mètres avant de me dire que ce n’était pas la peine d’aller plus loin. Heureusement, Joseph Fournier m’a vu faire demi-tour. Je n’ai pas été pris. Aspect actuel de cet endroit : il y a eu un remembrement, et les haies ont été coupées. Y a-t-il eu une dénonciation ? Je le croyais, mais maintenant je ne le pense plus depuis que M. Herzberg m’a dit que ce n’est qu’au PAX que les Allemands ont découvert que les enfants étaient juifs. Je reviens à l’arrivée du camion. Une partie des enfants étaient déjà descendus, certains ont voulu s’échapper. Moi, j’ai entendu des coups de feu (il paraît qu’il n’y a pas eu de blessés). Nous avons rassemblé les enfants près du camion. Joseph Fournier a dit qu’il s’était arrêté à cet endroit pour une pause pipi, et qu’il transportait les enfants vers un préventorium du Pas-de-l’Échelle. C’est à ce moment que tout s’est dénoué, car la directrice du préventorium attendait des enfants. Malheureusement, les Allemands étaient sur le point de partir au PAX, lorsqu’elle est retournée leur dire que ce n’étaient pas ces enfants-là qu’elle attendait. Finalement, tout le monde est parti au PAX à Annemasse, Fournier avec un Allemand à côté de lui dans le camion. Joseph Fournier a été arrêté et torturé au PAX, mais il a survécu. Il est décédé depuis, vers 1957, je ne me souviens plus exactement de l’année. Au PAX, lorsque sa femme a pu venir le voir le soir, il lui a dit : “Va dire à ma mère d’avertir Pierre Ruche, car demain matin, ils partent au Vuache, pour prendre le camp de l’A.S.” Joseph Fournier est enterré à Viry. Sa femme est retournée dans le Midi, d’où elle était originaire, à Béziers. Son gendre est Jean Buet, ancien président de l’Association des Frontaliers et adjoint au maire de Viry. Raoul Fournier, frère de Joseph Fournier, est lui aussi un ancien combattant (A.S.). Il habite à La Côte, Viry. Moi, j’étais à la fois F.T.P. et A.S. Après la Libération, je suis parti dans l’armée en Tarentaise et en Maurienne.
Déposition de M. Émile Barras le 18 octobre 1994, interviewé à son domicile de 01410 Chézery-Forens (Ain) par M. Herz, délégué Yad Vaschem (entretien enregistré sur cassette). Émile Barras : Je ne suis pas natif de Viry, mais j’y étais pendant la guerre, employé chez M. Chavaz, qui tenait le Café de la Poste, maintenant Les Vieux Tilleuls. Je suis binational, né en Suisse. 1942 : À l’époque, beaucoup de Juifs arrivaient dans ce café par car. Ils restaient un jour ou deux, s’inquiétant de la possibilité de passer en Suisse. On les voyait disparaître sans revenir : c’est qu’ils avaient réussi à passer. À l’occupation de la zone sud par les Allemands, il y a eu un afflux de Juifs au café. Je n’ai pas participé au passage de la frontière de ces Juifs-là. J’avais donné ma parole à M. Blanc, un ancien du 27e BCA, de passer éventuellement des aviateurs ou des personnes clandestines en France, et je ne voulais pas m’occuper des deux. Lieu de passage : près de la douane de Rougemont (commune de Soral, CH). À l’heure de la relève des douaniers, entre minuit moins trois et minuit plus trois minutes, on avait 90 % de chances de passer sans être pris. Sinon, bien souvent, si des Juifs passaient par là, ils étaient refoulés immédiatement. Une fois, sur ordre de mon chef, j’ai fait passer deux jeunes, un frère et une sœur. Mon chef m’avait dit en plaisantant : « Tu te paieras sur la fille. » Elle avait environ 16 ans, son frère était plus jeune. Ils n’ont pas été refoulés. Question de M. Herz : Certaines personnes que vous avez aidées se sont-elles manifestées après la guerre ? Êtes-vous resté en contact avec elles ? Hélas, non. Un seul témoignage, celui d’un capitaine anglais qui avait été blessé en 1914-1918. Il avait payé vingt-cinq mille francs à l’époque (1942-44) à un autre passeur pour se faire conduire en Suisse, mais il avait été abandonné dans les « bois blancs » (commune de Feigères, près de Saint-Julien-en-genevois). Arrivé avec un camarade dans un café de Viry, ils ont demandé si quelqu’un pouvait les conduire à la frontière. On est venu me chercher, mais je m’étais blessé au genou huit jours auparavant, en jouant au football. Je leur ai dit : « Je veux bien vous aider, mais il faudra du temps, je ne peux pas marcher vite. » Le foin était haut, c’était au mois de juin. Ils ont été patients, et nous avons bien traversé la frontière. Trois semaines plus tard, je suis allé en Suisse sur ordre de mon chef pour ramener des gars. Ces hommes allaient en Suisse pour obtenir de faux papiers, puis cherchaient à rejoindre l’Afrique du Nord ou l’Angleterre via la France et l’Espagne. Cette nuit-là, j’ai repris cet homme en Suisse avec un autre, les ai ramenés et les ai fait coucher dans le foin chez mon patron à Viry. Le lendemain matin, il m’a reconnu. Et j’ai ici un papier ; je pense que c’est lui qui me l’a envoyé après la guerre. Concernant les enfants juifs : un ami de Viry m’a contacté en mai 1944 pour me demander si j’accepterais de faire passer en Suisse des enfants juifs. Cet ami, c’était Joseph Fournier, le chauffeur de camion (dont nous avons déjà parlé lors d’un entretien précédent). Ces enfants devaient arriver par train, un mardi ou un mercredi. Il était convenu que je les prendrais à la gare de Viry pour les emmener à la frontière suisse. Je me suis présenté à la gare, le train devait arriver, je crois, à midi moins cinq. Mais quand je suis arrivé, il y avait des Allemands. Le train n’est pas arrivé. À midi pile, les Allemands sont repartis au Château de Viry (où ils stationnaient). C’était, je pense, la fin de leur service. La date : aux environs du 20 mai. (Plus tard) Le train est finalement arrivé. Trente-quatre enfants juifs en sont descendus, accompagnés de Marianne Cohn et d’une jeune assistante sociale. À l’époque, je ne connaissais pas Marianne Cohn. Peut-être l’avais-je rencontrée une semaine auparavant, mais je ne m’en souviens pas. La gare est en contrebas de Viry. Le chemin le plus court pour aller en Suisse aurait été de suivre la voie ferrée en direction de Saint-Julien, mais la voie passe par le pont sur la Laire, où nous aurions été à découvert, à la vue directe du château Via Marie où étaient les Allemands. J’ai donc fait monter les enfants au village de Viry. Nous avons pris l’ancienne route de Saint-Julien, puis traversé les champs jusqu’à la frontière suisse. Mais l’assistante sociale ne nous a pas suivis jusqu’au bout ; elle a continué vers Saint-Julien quand nous avons quitté la route. Elle et Marianne Cohn devaient se retrouver à Saint-Julien pour reprendre la direction d’Annecy. Lieu de passage de la frontière : près de la douane de Rougemont, appelée aussi Soral 1 ou Soral 2. Il y avait des barbelés tout le long de la frontière, du côté suisse, très tendus avec des pieux tous les deux mètres. Le fil de fer barbelé le plus bas frôlait le sol. J’ai posé mon veston dessus, soulevé le fil juste au-dessus, et Marianne Cohn a fait passer les enfants entre les deux fils, un par un. Pendant ce temps, du côté suisse, un douanier surveillait si les Allemands arrivaient d’un côté ou de l’autre. Quand tout le monde était passé, Marianne Cohn a donné ses instructions au douanier et lui a demandé de téléphoner à tel numéro à Genève. Ensuite, nous sommes repartis. (Je me suis demandé comment il se faisait qu’il y ait une organisation du côté suisse, en contact avec Marianne Cohn, mais que personne ne se soit jamais intéressé au sort des enfants du deuxième convoi, celui qui a été arrêté.) Je suis retourné avec Marianne Cohn de la frontière jusqu’à la route de Saint-Julien. Là, nous nous sommes séparés. Il était environ 14 h, c’était un mardi ou un mercredi. Marianne Cohn et moi avions à peu près le même âge. Il était entendu, lorsque nous nous sommes quittés, qu’un autre convoi aurait lieu la semaine suivante. Mais comme les Allemands étaient en gare de Viry, je me suis dit que ce convoi était compromis. (Quand j’ai vu, une semaine plus tard, que le camion transportant le deuxième groupe était suivi par les Allemands, je me suis longtemps demandé s’ils étaient suivis depuis longtemps ou non.) Après avoir signalé le passage réussi du premier groupe à Joseph Fournier, celui-ci, qui était en contact avec Marianne Cohn ou ses supérieurs, a décidé que Joseph Fournier irait chercher les enfants à Annecy avec son camion. Quand Joseph Fournier est arrivé à Viry avec les enfants dans le camion, je n’avais pas encore fini mon travail chez mon patron. J’étais en train de soigner les bêtes. C’est mon frère Raoul Fournier qui était sur place pour attendre le camion. Ensuite, Raoul Fournier est venu me prévenir que les enfants étaient arrivés. J’ai dit de mettre le camion à l’embranchement du chemin des … sur la route de Saint-Julien, en attendant que j’arrive. De chaque côté du chemin, il y avait une grosse haie. Je me suis dit que le camion pourrait reculer là-dedans et que nous serions tranquilles pour faire descendre les enfants. Le temps de finir de traire une vache et de porter le lait à la fromagerie, cela m’a pris un quart d’heure, vingt minutes au maximum. Puis j’ai pris mon vélo et suis allé sur la route de Saint-Julien. Quand je suis arrivé au carrefour de l’ancienne route, j’ai vu des casques allemands. J’ai fait encore trente mètres avant de me dire que ce n’était pas la peine d’aller plus loin. Heureusement, Joseph Fournier m’a vu faire demi-tour. Je n’ai pas été pris. Aspect actuel de cet endroit : il y a eu un remembrement, et les haies ont été coupées. Y a-t-il eu une dénonciation ? Je le croyais, mais maintenant je ne le pense plus depuis que M. Herzberg m’a dit que ce n’est qu’au PAX que les Allemands ont découvert que les enfants étaient juifs. Je reviens à l’arrivée du camion. Une partie des enfants étaient déjà descendus, certains ont voulu s’échapper. Moi, j’ai entendu des coups de feu (il paraît qu’il n’y a pas eu de blessés). Nous avons rassemblé les enfants près du camion. Joseph Fournier a dit qu’il s’était arrêté à cet endroit pour une pause pipi, et qu’il transportait les enfants vers un préventorium du Pas-de-l’Échelle. C’est à ce moment que tout s’est dénoué, car la directrice du préventorium attendait des enfants. Malheureusement, les Allemands étaient sur le point de partir au PAX, lorsqu’elle est retournée leur dire que ce n’étaient pas ces enfants-là qu’elle attendait. Finalement, tout le monde est parti au PAX à Annemasse, Fournier avec un Allemand à côté de lui dans le camion. Joseph Fournier a été arrêté et torturé au PAX, mais il a survécu. Il est décédé depuis, vers 1957, je ne me souviens plus exactement de l’année. Au PAX, lorsque sa femme a pu venir le voir le soir, il lui a dit : “Va dire à ma mère d’avertir Pierre Ruche, car demain matin, ils partent au Vuache, pour prendre le camp de l’A.S.” Joseph Fournier est enterré à Viry. Sa femme est retournée dans le Midi, d’où elle était originaire, à Béziers. Son gendre est Jean Buet, ancien président de l’Association des Frontaliers et adjoint au maire de Viry. Raoul Fournier, frère de Joseph Fournier, est lui aussi un ancien combattant (A.S.). Il habite à La Côte, Viry. Moi, j’étais à la fois F.T.P. et A.S. Après la Libération, je suis parti dans l’armée en Tarentaise et en Maurienne.
Témoignage d’Émile Barras, passeur dans la région de Viry-SoralViry a inauguré son parcours mémoriel, dédié aux résistants et à Marianne CohnViry est désormais un lieu de Mémoire à part entièreFigure de la résistance — Marianne CohnFigure de la résistance — Fournier JosephFigure de la résistance — Fournier RaoulLes Justes de Haute-Savoie
Le Souvenir Français œuvre pour que vive la mémoire de notre Nation au travers de trois grandes actions :1La sauvegarde de la totalité des tombes des combattants Morts pour la France et éviter que tous les jours les restes de combattants rejoignent les fosses communes municipales suite à des sépultures tombées en déshérence.2Le maintien des cérémonies patriotiques locales aux coté des grand date nationale et ce,bien que le nombre d’anciens combattants diminuent chaque année.3Le développement des voyages mémoriels afin qu’aucun enfant de France ne quitte sa scolarité sans avoir découvert un lieu de notre mémoire nationale ou participer à une commémoration.Pour atteindre ces objectifs,nous avons besoin de vous !