Le Souvenir Français
Délégation de la Haute-Savoie (74)
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Porte-drapeaux à 15 ans : cette jeunesse qui sert la mémoire

Les membres de l’association interviennent essentiellement auprès des collégiens de 3e, mais aussi auprès des cadets de la gendarmerie, des jeunes sapeurs-pompiers et des participants au Service national universel (SNU).

Pour faire face à la disparition inéluctable des anciens combattants, qui assument seuls la fonction de porte-drapeau, une école dédiée à ce rôle a été créée il y a quatre ans. Une initiative unique en France. Grâce à elle, de nombreux adolescents participeront aux commémorations de ce 11 novembre.

Le plus ancien porte-drapeau de Haute-Savoie - un ancien combattant d’Afrique du Nord - est aujourd’hui âgé de 87 ans. La plupart de ses collègues, pour leur part, ont 10 ans de moins. 15 dans le meilleur des cas. Bref, vous l’aurez compris, la moyenne d’âge des vétérans du département est assez élevée. Et leur nombre ne fait que diminuer.

Si leur disparition programmée pose d’évidents problèmes moraux (en particulier ceux ayant trait à transmission et au devoir de mémoire), elle en soulève d’autres plus terre à terre. Et notamment celui-ci : qui va porter les drapeaux lors des cérémonies officielles quand nos aînés ne seront plus là ?

Pour répondre à cette question, le territoire de la Haute-Savoie - sous l’impulsion du conseil départemental qui a financé l’opération -, a créé en 2019 une école des jeunes porte-drapeaux (EJP74). Une initiative « unique en France » selon Jean-François Bocquet, une de ses chevilles ouvrières, qui en est donc à sa quatrième saison.

Devenue associative en février dernier pour plus de lisibilité, cette structure - « qui ne fait ni du patriotisme exacerbé, ni de l’endoctrinement » -, fonctionne d’une façon très didactique.

Explications

« Généralement, nous sommes sollicités par un professeur d’histoire-géographie de troisième pour intervenir auprès de sa classe, dans son collège », commence par expliquer Jean-François Bocquet. Là, un premier module de deux heures, dispensé par un binôme aguerri (un membre de l’EJP et un militaire), permet de rappeler quelques bases aux adolescents. « On parle des drapeaux, des institutions, d’Histoire et bien sûr des cérémonies et de leurs quatre temps forts (le discours officiel, le dépôt de gerbe, la minute de silence et la Marseillaise) », détaille l’intervenant. Lors de ce M1, tout le groupe est concerné.

Puis, toujours dans l’établissement, mais à une autre date, et uniquement auprès des élèves du M1 qui se déclarent volontaires, un second module, de deux heures également, est organisé. « Au cours de celui-ci, on est davantage dans la partie “pratique”, poursuit notre interlocuteur. On présente le maniement du drapeau, la tenue vestimentaire, le rythme, les déplacements… » Traditionnellement, ce M2 se conclut par une cérémonie fictive.

3 000 jeunes ont été sensibilisés

Depuis que l’EJP74 existe, entre 2 500 et 3 000 jeunes haut-savoyards ont été sensibilisés à la fonction de porte-drapeau. Toutefois, seule une poignée d’entre eux a fini par endosser le costume. À Cluses, par exemple, il n’y a que huit adolescents qui ont rejoint une association mémorielle en trois ans (cinq en 2019-2020, trois en 2020-2021 et aucun l’année dernière).

Un brevet puis un diplôme

Une fois cet apprentissage terminé, les jeunes reçoivent un brevet. Mais leur cursus n’est pas terminé pour autant. « Ils ont ensuite trois ans pour trouver une association mémorielle à côté de chez eux et participer à au moins trois cérémonies officielles, explique Jean-François Bocquet. Ce n’est que s’ils remplissent cette condition que la préfecture leur délivre un diplôme en bonne et due forme. » Dès lors, ils ne sont plus considérés comme des jeunes porte-drapeaux mais comme des porte-drapeaux tout court.

EJP74 - Formation 45 jeunes Volontaires Service Nation à la Roche-sur-Foron (Haute-Savoie)

Souvent le résultat d’un héritage familial

Si les profils des candidats les plus motivés sont hétéroclites, il existe souvent des points communs entre eux. « Un héritage familial, un grand-père qui a combattu ou un sens du devoir un peu plus poussé que la moyenne », détaille le Haut-Savoyard. Sans oublier un soutien important des parents.

« Comme les jeunes porte-drapeaux sont mineurs, ils ont besoin qu’on les conduise à gauche à droite. Qu’on les soutienne et qu’on les encourage, notamment en assistant aux cérémonies. » Ce qui n’est pas plus mal car « ça garnit les rangs », note Jean-François Bocquet. « De même qu’il est préférable d’avoir 35 drapeaux au lieu de 5, on aime quand il y a un peu de public à ces rendez-vous. »

Pour ce dernier, l’autre grande mission de l’EDJ74 se trouve d’ailleurs là : « Au-delà de l’aspect “drapeaux”, on souhaite à travers notre école et nos jeunes réintéresser tous les citoyens à ce devoir de mémoire. » Dans ce cadre, quoi de mieux que des adolescents investis qui stimulent leurs parents ?

Amandine Marmoux à gauche, 18 ans, engagée depuis l’an dernier et Lou Burnier 13 ans, dont ce fut les premières cérémonies en ce 11-Novembre, accompagnées par Damien Casagrande, moniteur à l’école de porte-drapeau, conseiller municipal d’Eteaux, vice-président du Souvenir Français et Noël Suatton, ancien maire, membre du Souvenir Français.
Jean-Baptiste Serron, 10 nov. 2023