Le monument Saint-Gingolph — Stèle colonel-brigadier Julius Schwarz et le capitaine André Chaperon Dimanche matin, 23 juillet, les renforts allemands arrivent en camions et side-cars. Saint-Gingolph est même cerné par le lac. Ils fouillent systématiquement les maisons, enfoncent les portes à coups de crosse, rassemblent tous les objets de valeur qu'ils emporteront plus tard. La plupart des maisons sont ,vides, mais ils mettent la main sur huit habitants dont le curé, qu'ils enferment dans le poste de douane français. A 14 heures, le pire qu'on redoutait se produit: les SS dirigent rageusement leurs lance-flammes sur les granges de la partie supérieure du village. Et, tandis que l'incendie se communique aux maisons voisines, des soldats emmènent les otages. De brefs coups de feu: quatre otages sont abattus. Suivront deux autres dont le curé Roussillon; on découvrira son corps, criblé de balles, sur un talus. Alors que l'incendie fait rage, André Chaperon, président de Saint-Gingolph suisse, passe sur France pour ramener les personnes égarées, des femmes, des vieillards et des enfants. Vainement, il essaie de parlementer avec les chefs des SS dont le PC est situé à l'Hôtel Beau-Rivage. Pendant ce temps les flammes continuent à dévorer les maisons du village. «C'est à ce moment, raconte un témoin de l'époque, que le brigadier Schwarz est directement intervenu. Couvert par une mitrailleuse, il s'est adressé en allemand au commandant des SS qui se tenait sur le pont. Il lui fit observer que l'église menacée d'incendie, avec les femmes et les enfants dedans, appartenait à la paroisse entière de Saint-Gingolph, c'est-à-dire aux habitants des deux villages frontaliers français et suisse, et qu'au cas où les Allemands s'en prendraient à elle, il la défendrait manu militari. C'est à lui que l'église doit de n'avoir pas brûlé avec le reste en-dessous de la voie de chemin de fer et de la route. » Comme le brigadier craint que l'incendie ne se propage en Suisse, il commande douze camions militaires pour une éventuelle évacuation de la population. L'incendie a pris des proportions immenses. Le vent qu souffle aide encore à l'étendre à travers rues et ruelles jusqu'au lac. De la rive suisse, on voit tourbillonner d'énormes nuages issus de ce brasier, qui s'élèvent dans le ciel couleur de plomb. Les spectateurs du drame se taisent. On murmure: «Saint-Gingolph brûle… ». Quel est le sort des parents demeurant là-bas CommémorationSous occupation italienne depuis 1942, puis allemande, Saint-Gingolph est un lieu hautement stratégique. Rapidement, un maquis se créé sur les hauteurs du Locum, à la grange de la Qatte. Le 22 juillet 1944, le maquis tente une attaque du poste-frontière allemand à l’heure du repas. La réussite de cette mission est basée sur l’effet de surprise. Effet totalement gâché quand un jeune maquisard perd son sang-froid à la vue d’une patrouille allemande sur les hauts du village. En 1940, à la suite de l'armistice franco-allemand, l'armée italienne prend position à la frontière franco-suisse de la partie française de Saint-Gingolph, remplacée par l'armée allemande en septembre 1943. Un réseau de résistance se met en place à Abondance. André Zénoni est le responsable de la section de Saint-Gingolph. 22 juillet 1944, dans la journée La section de Francs-tireurs et partisans de Thonon, compagnie 93-21 (F.T.P.F), donne l'ordre de passer à l'insurrection générale et d'attaquer tous les postes allemands de la rive du lac Léman. Les FTP d'Abondance, Compagnie 93-09 (F.T.P.F) sont désignés pour le poste de Saint-Gingolph. L'attaque est fixée au 14 juillet 1944, mais, après avoir été repérée par des patrouilles allemandes à Vinzier, l'attaque est finalement repoussée au 22 juillet 1944 à 12h00. Il faudra jouer sur l'effet de surprise, car les Allemands seront en train de prendre leur repas à l'Hôtel de France, sur le quai français. Le jour dit, à 7h00 environ, les maquisards prennent la route de Saint-Gingolph. À 11h00, un premier groupe descend par l'ancienne route de Novel, l'autre arrive par la route d'Évian. Le premier groupe tombe sur une patrouille de deux soldats allemands qui discutent avec une femme, Mme Béchet. Les hommes du maquis tentent un encerclement, mais, perdant son sang-froid, un jeune prend son fusil-mitrailleur et tire. Un soldat et la femme sont tués, le deuxième soldat est blessé. Il réussit néanmoins à se retirer vers le vallon de la Morge, où il restera caché. Les coups de feu donnent l'alarme. Les soldats en repos s'arment et partent au combat. La rue Nationale est le théâtre d'un violent combat. Après plusieurs blessés graves qui seront évacués vers l'hôpital de Monthey en Suisse, les résistants battent en retraite. Côté allemand, on compte une dizaine de morts. Deux civils français sont tués pendant la fusillade. 22 juillet 1944, en soirée André Chaperon, avocat-notaire, capitaine de l'armée suisse et président (maire) de la partie suisse de Saint-Gingolph s'attend à des représailles des Allemands. Il se rend sur le territoire français pour tenter de parlementer. Le capitaine Hartmann, chef de la garnison allemande, lui affirme qu'il a reçu l'ordre de raser tout le village. L'église de Saint-Gingolph étant un bien commun des deux communes, André Chaperon obtient sa sauvegarde, ainsi que celle des bâtiments se trouvant en dessous de la voie ferrée. Pendant ce temps, prise de panique, la population passe la frontière, ouverte sur ordre du colonel-brigadier suisse Julius Schwarz, commandant de la Brigade de montagne 10 stationnée en Valais, et est accueillie en Suisse. Des trains sont organisés pour évacuer la population française sur Vevey de l'autre côté du lac Léman. 23 juillet 1944 Vers 11 h, des renforts SS venus d'Annemasse et équipés de lance-flammes arrivent à Saint-Gingolph en sidecar et en bateau avec pour ordre de raser le village et d’exercer des représailles. Les bâtiments sont fouillés, le bétail et des biens sont saisis. Huit personnes qui n'étaient pas passées en Suisse sont prises en otage2 : Arlette Boch, 30 ans, commerçante René Boch, commerçant Henri Rinolfi, 70 ans, handicapé Louis Veillant, employé d'hôtel Élie Derivaz, fonctionnaire Louis Rossillon, abbé de la paroisse M. Roux, receveur des postes, et sa fille de 13 ans. Les deux derniers seront libérés : les six autres sont fusillés au centre du village. À 15 h, les lance-flammes entrent en action et embrasent les premières maisons, pour la plupart des granges en bois dans le haut du village. ▶ Seul, le colonel-brigadier Julius Schwarz se rendit alors auprès des officiers SS installés à l’hôtel Beau-Rivage. Il leur fait comprendre en allemand que la poursuite des exécutions ainsi que la mise à feu de maisons appartenant à des citoyens suisses, nombreuses dans la partie française du village, entraînerait l’intervention de l’important contingent de la Brigade de montagne 10 concentré à la frontière. Ce coup de bluff fait son effet et la rue Nationale, axe principal de Saint-Gingolph avec commerces, hôtels et restaurants, fut épargnée par l’incendie. Au bout de quelques heures, l’église se trouve menacée, malgré la promesse du capitaine Hartmann de la protéger. Il autorise alors les pompiers suisses à se rendre en France pour éteindre l’incendie. D’âpres combats ont alors lieu sur la rue Nationale. Plusieurs maquisards sont tués, ainsi qu’une demie-douzaine de douaniers allemands. Un civil est victime d’une balle perdue. Le président de Saint-Gingolph Suisse d’alors, André Chaperon, sait que les Allemands voudront se venger et commencent alors des négociations. Il fait protéger les maisons appar- tenant à des ressortissants suisses côté français, per-mettant ainsi de sauver quelques bâtisses. Le lendemain, un détachement S.S. est effectivement envoyé d’Annemasse pour venger la mort des alle- mands tués la veille. Le village est en grande partie incendié et 6 otages gingolais fusillés : René Boch, 70 ans, commerçant Sa fille Arlette Boch, 30 ans, commerçante Louis Véyan, employé d’hôtel Élie Derivaz, fonctionnaire Henri Rinolfi, 70 ans, bucheron handicapé L’abbé Louis Rossillon, curé de notre paroisse franco-suisse Le salut de la population gingolaise française vient de la bravoure et de l’amitié de nos amis suisses, qui contre les ordres de Berne, ouvrent la frontière et accueillent les réfugiés. ▶ Émission radiode la RTS - René Chapon : En juillet 1944, une opération de la Résistance française est suivie par une terrible répression de la part des Nazis : un événement qui sera connu sous le nom de « tragédie de Saint-Gingolph ». Les voisins suisses, choqués, voyaient alors la violence de la guerre à leurs portes.Saint-Gingolph — 22 et 23 juillet 1944 : Tragédie — 3808 W1498 InscriptionReconnaissance à nos amis de l’armée suisse, le colonel-brigadier Julius Schwarz et le capitaine André Chaperon, dont l’énergique intervention sauva Saint-Gingolph d’une destruction totale. Articles externesJulius Schwarz, l'âme et le coeur de la Brigade de montagne 10
Sous occupation italienne depuis 1942, puis allemande, Saint-Gingolph est un lieu hautement stratégique. Rapidement, un maquis se créé sur les hauteurs du Locum, à la grange de la Qatte. Le 22 juillet 1944, le maquis tente une attaque du poste-frontière allemand à l’heure du repas. La réussite de cette mission est basée sur l’effet de surprise. Effet totalement gâché quand un jeune maquisard perd son sang-froid à la vue d’une patrouille allemande sur les hauts du village. En 1940, à la suite de l'armistice franco-allemand, l'armée italienne prend position à la frontière franco-suisse de la partie française de Saint-Gingolph, remplacée par l'armée allemande en septembre 1943. Un réseau de résistance se met en place à Abondance. André Zénoni est le responsable de la section de Saint-Gingolph. 22 juillet 1944, dans la journée La section de Francs-tireurs et partisans de Thonon, compagnie 93-21 (F.T.P.F), donne l'ordre de passer à l'insurrection générale et d'attaquer tous les postes allemands de la rive du lac Léman. Les FTP d'Abondance, Compagnie 93-09 (F.T.P.F) sont désignés pour le poste de Saint-Gingolph. L'attaque est fixée au 14 juillet 1944, mais, après avoir été repérée par des patrouilles allemandes à Vinzier, l'attaque est finalement repoussée au 22 juillet 1944 à 12h00. Il faudra jouer sur l'effet de surprise, car les Allemands seront en train de prendre leur repas à l'Hôtel de France, sur le quai français. Le jour dit, à 7h00 environ, les maquisards prennent la route de Saint-Gingolph. À 11h00, un premier groupe descend par l'ancienne route de Novel, l'autre arrive par la route d'Évian. Le premier groupe tombe sur une patrouille de deux soldats allemands qui discutent avec une femme, Mme Béchet. Les hommes du maquis tentent un encerclement, mais, perdant son sang-froid, un jeune prend son fusil-mitrailleur et tire. Un soldat et la femme sont tués, le deuxième soldat est blessé. Il réussit néanmoins à se retirer vers le vallon de la Morge, où il restera caché. Les coups de feu donnent l'alarme. Les soldats en repos s'arment et partent au combat. La rue Nationale est le théâtre d'un violent combat. Après plusieurs blessés graves qui seront évacués vers l'hôpital de Monthey en Suisse, les résistants battent en retraite. Côté allemand, on compte une dizaine de morts. Deux civils français sont tués pendant la fusillade. 22 juillet 1944, en soirée André Chaperon, avocat-notaire, capitaine de l'armée suisse et président (maire) de la partie suisse de Saint-Gingolph s'attend à des représailles des Allemands. Il se rend sur le territoire français pour tenter de parlementer. Le capitaine Hartmann, chef de la garnison allemande, lui affirme qu'il a reçu l'ordre de raser tout le village. L'église de Saint-Gingolph étant un bien commun des deux communes, André Chaperon obtient sa sauvegarde, ainsi que celle des bâtiments se trouvant en dessous de la voie ferrée. Pendant ce temps, prise de panique, la population passe la frontière, ouverte sur ordre du colonel-brigadier suisse Julius Schwarz, commandant de la Brigade de montagne 10 stationnée en Valais, et est accueillie en Suisse. Des trains sont organisés pour évacuer la population française sur Vevey de l'autre côté du lac Léman. 23 juillet 1944 Vers 11 h, des renforts SS venus d'Annemasse et équipés de lance-flammes arrivent à Saint-Gingolph en sidecar et en bateau avec pour ordre de raser le village et d’exercer des représailles. Les bâtiments sont fouillés, le bétail et des biens sont saisis. Huit personnes qui n'étaient pas passées en Suisse sont prises en otage2 : Arlette Boch, 30 ans, commerçante René Boch, commerçant Henri Rinolfi, 70 ans, handicapé Louis Veillant, employé d'hôtel Élie Derivaz, fonctionnaire Louis Rossillon, abbé de la paroisse M. Roux, receveur des postes, et sa fille de 13 ans. Les deux derniers seront libérés : les six autres sont fusillés au centre du village. À 15 h, les lance-flammes entrent en action et embrasent les premières maisons, pour la plupart des granges en bois dans le haut du village. ▶ Seul, le colonel-brigadier Julius Schwarz se rendit alors auprès des officiers SS installés à l’hôtel Beau-Rivage. Il leur fait comprendre en allemand que la poursuite des exécutions ainsi que la mise à feu de maisons appartenant à des citoyens suisses, nombreuses dans la partie française du village, entraînerait l’intervention de l’important contingent de la Brigade de montagne 10 concentré à la frontière. Ce coup de bluff fait son effet et la rue Nationale, axe principal de Saint-Gingolph avec commerces, hôtels et restaurants, fut épargnée par l’incendie. Au bout de quelques heures, l’église se trouve menacée, malgré la promesse du capitaine Hartmann de la protéger. Il autorise alors les pompiers suisses à se rendre en France pour éteindre l’incendie. D’âpres combats ont alors lieu sur la rue Nationale. Plusieurs maquisards sont tués, ainsi qu’une demie-douzaine de douaniers allemands. Un civil est victime d’une balle perdue. Le président de Saint-Gingolph Suisse d’alors, André Chaperon, sait que les Allemands voudront se venger et commencent alors des négociations. Il fait protéger les maisons appar- tenant à des ressortissants suisses côté français, per-mettant ainsi de sauver quelques bâtisses. Le lendemain, un détachement S.S. est effectivement envoyé d’Annemasse pour venger la mort des alle- mands tués la veille. Le village est en grande partie incendié et 6 otages gingolais fusillés : René Boch, 70 ans, commerçant Sa fille Arlette Boch, 30 ans, commerçante Louis Véyan, employé d’hôtel Élie Derivaz, fonctionnaire Henri Rinolfi, 70 ans, bucheron handicapé L’abbé Louis Rossillon, curé de notre paroisse franco-suisse Le salut de la population gingolaise française vient de la bravoure et de l’amitié de nos amis suisses, qui contre les ordres de Berne, ouvrent la frontière et accueillent les réfugiés. ▶ Émission radiode la RTS - René Chapon : En juillet 1944, une opération de la Résistance française est suivie par une terrible répression de la part des Nazis : un événement qui sera connu sous le nom de « tragédie de Saint-Gingolph ». Les voisins suisses, choqués, voyaient alors la violence de la guerre à leurs portes.Saint-Gingolph — 22 et 23 juillet 1944 : Tragédie — 3808 W1498
Reconnaissance à nos amis de l’armée suisse, le colonel-brigadier Julius Schwarz et le capitaine André Chaperon, dont l’énergique intervention sauva Saint-Gingolph d’une destruction totale.