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Il n’y avait pas d’André Malraux à Genève jeudi 13 octobre pour l’hommage à Noëlla Rouget, mais l’on y a tout de même entendu des paroles fortes tout au long de la cérémonie, voulue par son ami, le Consul de France Patrick Lachaussée, et organisée grâce à l’association Mémoires.
La soirée était extraordinaire à plus d’un titre. Par la solennité qui s’en dégageait, alors que les autorités franco-genevoises sont arrivées précédées d’un détachement des Vieux Grenadiers. Par la présence de Benoît Puga, grand chancelier de la Légion d’honneur depuis 2017, qui représentait le Président de la République. Par le fait que Noëlla Rouget sera la première civile sur le monument aux morts français et suisses des deux guerres mondiales aussi. Par la personnalité exceptionnelle qu’elle fut surtout, avant son décès à près de 101 ans, à l’automne 2020.
Institutrice née à Saumur (Maine-et-Loire), Noëlla Rouget est entrée dans la Résistance dès les débuts de l’occupation, à un peu plus de 20 ans, avant de rejoindre le mouvement gaulliste Honneur et patrie et le réseau Buckmaster.
Agent de liaison, elle rencontre son celui qui deviendra son fiancé dans la Résistance. Tous deux sont arrêtés en juin 1943. Il sera fusillé, elle, déportée à Ravensbrück. C’est là, dans cet endroit déserté par Dieu, derrière le block 27, avec ses amies Geneviève de Gaulle ou Germaine Tillion qu’elle s’est réchauffée par la poésie, et en priant, y compris pour les terribles gardiennes SS, avant d’être libérée.
« Et c’est ici en Suisse qu’elle a pu se reconstruire grâce à la générosité de madame Anthonioz de Gaulle et de nombreux Suisse », a rappelé Patrick Lachaussée.
En 1966, elle fait preuve d’une incroyable grandeur morale : elle obtient la grâce de son bourreau par le général de Gaulle, malgré l’incompréhension d’autres déportées. « Noëlla Rouget a sauvé son âme à elle en lui sauvant la vie », comme l’a souligné le président du Gouvernement genevois, Mauro Poggia. Elle a tenu bon, y compris quand elle a correspondu avec le Gestapiste Jacques Vasseur, et que celui-ci n’a jamais exprimé la moindre once de remords.
Quand le négationnisme s’est réveillé dans les années 80, elle est allée témoigner partout, et ce jusqu’à l’âge de 96 ans. Cette démarche l’a guérie de ses cauchemars. Elle a bouleversé aussi des générations de jeunes Haut-Savoyards, Gessiens ou Genevois qu’elle a même accompagnés à Auschwitz.
« Je ne sais pas ce que Noëlla aurait pensé de tout cela », a-t-on entendu d’une proche dans la foule jeudi soir pendant la cérémonie. « Rappelons-nous de la brièveté de notre existence et de l’éternité de notre destinée », a-t-il été dit, comme en réponse.
Si Noëlla Rouget était d’une simplicité totale, son exemple la dépasse elle-même. Elle représente aussi ce que Genève, cette ville de paix, veut être. « Nous allons adresser au Conseil d’État une demande pour créer une place Noëlla Rouget sur cette partie de la rue Jean-Sénébier. Il y a un critère qu’elle ne remplit pas : être décédée depuis plus de 10 ans. J’espère que le Conseil d’État fera une exception », a précisé le conseiller administratif, Alfonso Gomez.
Si sa trace sera inscrite sur les murs, et dans la pierre de la plaque apposée au pied du monument, Noëlla Rouget reste incroyablement vivante dans la mémoire de ceux qui l’ont connue, et même ceux qui ne l’ont pas connue. C’est le cas des élèves du lycée professionnel de Saumur, bac pro commerce et BTS métiers de l’hôtellerie-restauration. En 2020, lorsque le Covid leur a imposé de rester à domicile, leur professeur les a fait travailler sur Noëlla Rouget, qu’elle ne connaissait pas. Sa trajectoire les a tellement bouleversés qu’ils ont depuis réalisé une exposition et aimeraient que leur lycée soit rebaptisé.
Ils étaient présents en Suisse pour marcher sur les traces de Noëlla Rouget et rencontrer des jeunes. Afin d’être comme cette grande dame, « un pont entre deux pays, par-dessus les murs de la haine, du rejet et de l’ignorance », selon les mots de Mauro Poggia…
Le DauphinéSébastien COLSON ,Article du 16 octobre 2022
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