Le Souvenir Français
Délégation de la Haute-Savoie (74)
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A.S. Compagnie de Megève

Chef : Hilaire Socquet-Clerc, Charles Socquet
Chef  A.S. Compagnie de Megève

A.S. Compagnie de Megève

,Type Action /

R.F.I : Armée secrète /
Rattachement : A.S. du secteur de Bonneville /
Communes : Megève / Praz-sur-Arly / Combloux / Passy /

À Megève, dès 1941, un petit groupe de résistants se constitue avec Alphonse Dubois, Louis Jeanroy, Pierre Prunier et Paul Barroud. Petit à petit, et surtout à partir de la mise en place du Service de travail obligatoire (S.T.O.), la troupe se développe et compte en particulier Hilaire Socquet et Marcel Hulot, chef de la gendarmerie. « Armand Arvin-Bérod de Praz-sur-Arly et Paul Barroud essayaient de créer de petites unités de combat, relate le docteur Charles Socquet, ancien résistant. Pierre Prunier assurait la liaison avec Bonneville et surtout Sallanches, où Dominique Cancillieri était chef de secteur. »

En novembre 1942, après le débarquement en Afrique du Nord, la zone libre est supprimée. Les terres savoyardes vivent alors sous occupation italienne. À cette époque, la mairie reçoit un courrier préfectoral l’informant de la création « de colonies de vacances dans le département » pour accueillir les enfants des régions bombardées. En mars 1943, la station est fermée aux touristes par décision du gouvernement « à la suite d’abus regrettables constatés ». Plus de 3 000 personnes doivent quitter la station. « Une soixantaine de policiers, débarqués de trois cars venus d’Annecy, font irruption dans les hôtels et les chalets », rapporte Le Petit Dauphinois du 8 mars 1943. L’Union des intérêts commerciaux de Megève adresse alors une lettre à la municipalité pour protester. « Ce courrier devient sans objet par suite des circonstances présentes, et entre autres de l’obligation faite à Megève d’héberger des Israélites et de recevoir des enfants des régions bombardées », peut-on lire dans le registre des délibérations communales du 20 avril 1943.

Les jeunes réfractaires au STO installés dans un chalet sur le plateau de Véry attaqués le 13 juin 1943

De son côté, le groupe de résistants installe les jeunes réfractaires au S.T.O. (service de travail obligatoire) dans un chalet sur le plateau de Véry. L’alpage est attaqué le 13 juin 1943 par les Italiens qui font 9 prisonniers, tandis que 16 hommes réussissent à prendre la fuite. Le chalet est également brûlé. Gaspard Giazzi est arrêté, Alphonse Dubois quitte Megève pour un temps. À la fin du mois de septembre, le Dr Charles Socquet est nommé chef de secteur pour Megève.

Puis la Résistance locale se réorganise. Elle se réclame de l’Armée secrète (A.S. Compagnie de Megève). Mme Petitjean, secrétaire de la mairie de Demi-Quartier, et le chef Hulot procurent de fausses cartes d’identité.

Fin septembre 1943, Jean Rosenthal, dit Cantinier, arrive de Londres pour dresser un tableau de la situation dans la région. Il installe un poste à Megève pour assurer la liaison radio avec la France libre. Au 21 janvier 1944, une quinzaine de prisonniers mégevans sont encore en captivité. René Mabboux et René Duvillard, respectivement président et secrétaire du Comité d’entraide aux prisonniers, obtiennent une subvention communale de 1 000 F, qu’ils souhaitent déposer sur un livret de caisse d’épargne.

Au mois de février, un parachutage a lieu au hameau de Lady. Le groupe local de résistants récupère et cache les armes. Fin mars, le maquis des Glières est attaqué et détruit par les troupes allemandes. Mais le 6 juin, les Alliés débarquent en Normandie. Le 9 juin, les brigades de gendarmerie reçoivent l’ordre de se rendre à Bonneville. Certaines, comme la brigade de Megève, refusent et rejoignent le (A.S. Compagnie de Megève) du côté du Christomet.

Dans la nuit du 16 au 17 juin, sur ordre de Dominique Cancillieri, les résistants neutralisent et empêchent une garnison ennemie de se rendre au Fayet comme prévu. En outre, deux soldats allemands sont désarmés dans la rue et faits prisonniers, tandis qu’un troisième s’enfuit. Des troupes d’occupation arrivent rapidement à Megève et tentent “d’intimider la population en tirant en l’air et sur les façades de la Petite Taverne et de la Croix d’Or”, mentionne Michel Germain dans son livre Le Prix de la Liberté. Puis, elles se retirent au Coq de Bruyère, un hôtel qui leur sert de caserne.

Paul Barroud, René Booz, Pierre Prunier et Albert Sulpice organisent le siège du bâtiment. Des renforts viennent de Sallanches, tandis qu’Alphonse Dubois arrive avec d’autres hommes. L’hôtel est pris d’assaut. L’opération cause la mort d’un soldat allemand et quatre autres personnes sont blessées, dont deux mortellement. Dans le territoire, la tension monte. L’ennemi va sûrement revenir en force. Des représailles ?

Ce dimanche matin, 18 juin, jour de la Fête-Dieu, les familles se rendent à la messe. Trois cars de soldats, douaniers et policiers allemands montent de Sallanches avec à leur tête un véhicule blindé. Ils arrivent sur la place, procèdent à des arrestations et à une série de pillages (archives du Rhône, crimes de guerre en région Rhône-Alpes).

Puis, c’est la confusion. Veulent-ils brûler l’église ou des maisons, comme la Petite Taverne qui serait un repaire de terroristes ? Avec courage, le maire, Charles Feige, s’interpose. Lui et Lydie Gachet sont emmenés comme otages à Annecy, d’où ils sont libérés un peu plus tard. Les prisonniers allemands sont finalement relâchés aussi et, au lieu de fuir, rejoignent leur garnison au Fayet. Le 28 juin, les troupes ennemies perquisitionnent chez plusieurs résistants dont le Dr Hilaire Socquet-Clerc (A.S. Compagnie de Megève)…

Au 1er  août, l’effectif de la petite armée de résistants est de 74 hommes placés sous les ordres de Paul Barroud. Grâce à l’important parachutage effectué du côté du Jaillet, comprenant 20 containers d’armes et de munitions, il peut « constituer un corps franc efficace ». C’est alors que le plus gros parachutage est effectué sur le plateau des Glières où des centaines d’hommes sont à nouveau réunies. « Ils réceptionnent 162 tonnes tombées du ciel en plein jour. Alors commence la quinzaine de la Libération. Les FFI descendent des montagnes…  », écrit encore Michel Germain. Et le 15 août, les alliés débarquent en Provence.

À partir de la mi-août les villes haut-savoyardes sont libérées À la mi-août, les communes de Cordon, Combloux, Saint-Roch et surtout Megève sont aux mains de la Résistance. « Le groupe local de résistants participe ensuite aux opérations militaires », raconte le Dr Charles Socquet. Si au début de l’année, les effectifs des forces d’occupation dans le secteur représentent une centaine d’hommes, en août, ils ne sont plus qu’une cinquantaine, regroupés au Fayet essentiellement. L’idée est de maîtriser les voies d’accès pour isoler les différentes garnisons les unes des autres. Durant cette manœuvre, le corps armé de Paul Barroud prend le contrôle de la route de Megève menant à Saint-Gervais. Petit à petit, les autres communes du Pays du Mont-Blanc sont libérées. Paul Caillet devient maire de la commune le 15 septembre À Megève, un Comité de libération se constitue avec Paul Caillet, Marcel Tisserand, Gaston Morand, Pierre Renard, Michel Gachet, Louis Jeanroy, Hilaire Périnet, Gustave Muffat, Lucien Morand, Alphonse Dubois, Albert Sulpice et Pierre Bouchard. Durant la réunion du conseil municipal du 23 août 1944, ils déclarent « vouloir prendre en mains suivant les instructions du gouvernement provisoire de la République, l’administration civile de la commune, les pouvoirs réglementaires et de police ». Charles Feige, le maire, leur remet symboliquement les clefs et le cachet officiel de la mairie. Le 26 août, le conseil municipal démissionne et le Comité de libération se met en place. Le 15 septembre, Paul Caillet est élu maire de la commune. Marcel Tisserand et Gaston Morand deviennent adjoints.

LA photo

Photo : Robert Muffat-Joly

Derrière ce cliché issu de la collection de Robert Muffat-Joly, derrière ces visages pour la plupart souriants, se cache l’histoire d’un rude combat qui s’est déroulé la veille. Cette photo a été prise à Praz-sur-Arly le 25 août 1944, lorsque ces enfants du pays sont accueillis en héros par la population praline. La veille, ils combattaient contre les Allemands à Bourg-Saint-Maurice.

Le 23 août ils sont aux Chappieux. Le 24 août, ils partent à la Tour du Chatelard, au dessus de Bourg-Saint-Maurice (lieu dit les Échines). Les Allemands sont alors en déroute dans une bonne partie de la Savoie, attaqués de toutes parts par les maquisards.

Les membres de l’A.S. Compagnie de Megève (dont le [dr]Charles Socquet) sont envoyés au dessus de Bourg-Saint-Maurice pour porter une attaque à une garnison allemande qui tient la Tour.

  • C’était mon premier vrai combat” se souvient Robert Muffat-Joly. “La situation était difficile car nous étions face à des troupes aguerries et bien armées, équipées de mortiers et de mitrailleuses alors que nous n’avions aucune arme lourde. Je me souviens très bien qu’un feuillu, dont le tronc devait pourtant bien faire dix centimètres de diamètre, a été littéralement ouvert en deux par une mitrailleuse tout près de moi.”

Pour ne rien arranger, l’artillerie allemande basée à Seez, bombarde les assaillants, guidée par un avion d’observation. “Entre le coup de canon et l’explosion, il se passait 11 secondes !”

Malgré leur vaillance, les Résistants ne pourront pas atteindre la Tour. Les Allemands de la garnison vont se replier en direction du Col du Grand Saint-Bernard. En représailles, l’artillerie de Séez bombardera les fermes des environs.

Les maquisards, eux, parviennent à s’abriter et à se replier dans des conditions délicates et sous le feu de l’ennemi.

La section comptera deux blessés : Ralph a reçu un éclat d’obus dans le genou ; Wallache a un doigt ouvert. Le bilan reste tout de même mesuré au regard des combats.

Les blessés sont évacués à pied (Ralph à dos de mulet) via le col du Bonhomme. Les autres redescendent en direction de Bourg Saint-Maurice. Ils croiseront plus tard un camion qui les ramènera à Praz, via Albertville qui a déjà été libérée.

Tous se retrouveront à Praz-sur-Arly. L’instant sera immortalisé par cette photo et par le chant de la Marseillaise, qu’entonneront les maquisards et les habitants.

  • Au 1er  plan (de gauche à droite) : Hilaire Socquet-Clerc (chef de secteur de l'Armée Secrète pour Megève, Praz et Combloux), l’infirmière du maquis Claude Niquet, qui travaillait avec le Dr Socquet, et Armand Arvin-Bérod “des Varins”.
  • 1er  rang derrière eux (de g. à d.) : Fernand Bouvet, Eloi Muffat-Es-Jacques, ????, Pierre Gibellino, René Bessy, Jean Mollier et Joseph Arvin-Bérod.
  • 2e  rang (personne seule au milieu) : Marius Gibellino (servant de fusil mitrailleur pour André Jaccaz).
  • 3e rang (de g. à d.) : Wallache (dit “La Vache”, juif réfugié ici avec son épouse, opérateur radio du chef de section), Aldo Bolatto, Hubert Joguet (qui a le casque), Ernest Feige, Robert Muffat-Joly (qui a alors 18 ans) et un Morand de Cassioz (neveu de Hilaire Socquet).
  • 4e rang (dernier plan, de g. à d.) : Julien Grosset (Café de la Poste), Marcel Laloyau (visage presque caché), René Muffat, Jean Favray, Fernand Jaccaz, André Jaccaz et Antoine Bessy (dernier à droite avec le béret).

Manque : Jacques Lefort, Beer alias Olivier

, Hackett

Portrait de maquisard

Les maquis